LES MODÉLES NUMÉRIQUES

<= Notes sur les pratiques techniques


Les modèles sont des programmes informatiques simulant l'évolution de l'atmosphère. Une simulation se base sur les données présentes de l'atmosphère, et applique des lois d'évolutions pour calculer son état futur, à partir duquel on pourra prévoir le temps. Chaque simulation s'appelle une "sortie" ou un "run". Aprés quelques heures de calcul nécessitant l'utilisation de super-calculateurs, les résultats sont présentés sous forme de cartes ou diagrammes divers. La pratique a ses limites, en particulier à longue échéance, et un modèle reste avant tout un outil de prévision, indispensables certes, mais non infaillible.

Principe: Les modèles divisent toute l'atmosphère en un maillage tridimensionnel et la simulation donnera les résultats maille par maille. Tout phénomène de dimension inférieure à la taille de la maille (convection, relief, rayonnement du sol, turbulence au sol, etc.) ne pourra être pris en compte directement, mais on peut essayer de prévoir leur effet moyen, c'est ce qu'on appelle la paramétrisation. Le maillage et la paramétrisation différent beaucoup suivant les modèles. Ainsi les modèles globaux, qui s'intéressent au temps sur tout le globe doivent avoir une maille assez grossière (plus de 50 km de côté horizontal), afin de rester dans des temps de calculs acceptables. Les modèles régionaux ont un maillage plus fin, ce qui permet de prendre en compte des phénomènes de plus petites échelle. Mais comme ces modèles ont besoin de connaitre l'état atmosphèrique des autres parties du globe, on doit interpoler les résultats du modèle global au modèle régional, ce qui pose de sérieux problèmes d'analyse numèrique.

Sensibilité numèrique: au fur et à mesure des calculs l'erreur numèrique s'accroit, le modèle devant résoudre une dizaine d'équations pour chaque maille et chaque pas de temps, et la précision des prévisions décroît jusqu'à devenir insignifiante au bout de quelques jours. Une petite variation initiale dans la modèlisation va s'accroitre de façon drastique, et Il est ainsi illusoire de vouloir prévoir le temps de façon fiable, même grossièrement, au delà de 10 jours.


Equations du modèle: il y a trois inconnues principales, température, pression et vent, qu'il faut calculer pour chaque maille. L'intervalle d'intégration est le "pas de temps" du modèle, correspondant à la durée entre deux échances consécutives calculables par le modèle (ci. 10min).
Prise en compte du paramètre humidité: la vapeur d'eau est assez instable dans les conditions atmosphériques, tendant à se liquéfier ou se vaporiser suivant les conditions. Les modèle globaux ne gèrent en général que le transport de la vapeur d'eau et des nuages par le vent sans prévoir la phase intermédiaire de formation/dissipation des nuages. Les nuages réchauffent l'air au moment de leur formation (la vapeur d'eau libère de l'énergie en se transformant en gouttelettes), expliquent les pluies, et réfléchissent une partie du rayonnement solaire, le modèle doit donc absolument les simuler, dans la partie "paramétrisation". Comme les modèles calculent l'humidité moyenne sur une maille on peut se faire une idée sur la densité de nuages, en-dessous de 50% d'humidité on peut considérer que les nuages seront très rares, au dessus de 80% le ciel sera très nuageux.

Près du sol, l'humidité est difficilement prévisible puisqu'il y a une forte interaction avec la surface (fleuves, rejets industriels, relief...) et complique ainsi la prévision du brouillard (ce qui peut fausser les prévisions de température au sol) et autres nuages bas. 

Il faut toujours étudier les prévisions de pluie avec du recul. Lorsque la situation est très convective (averses, orages) les pluies s'organisent à très fine échelle, ce que les modèles sont incapables de prévoir. Dans cette situation, doit considérer la prévision de pluie plus comme une probabilité de pluie, l'idéal étant d'étudier la situation convective pour anticiper l'organisation et l'intensité possible des pluies. Mais attention la paramétrisation de la convection est parfois mal stabilisée, conduisant le modèle à prévoir des résultats peu réalistes.


Le modèle GFS: modèle américain à maillage assez fin pour l'Amérique, un peu plus large pour l'Europe. Il offre des réactualisations 4 fois par jours, à 00hTU, 06hTU, 12hTU et 18hTU. Néanmoins, les runs de 00hTU et 12hTU sont les plus importants; les deux autres runs ne prenant en compte que des données moindres. Ce modèle propose des échéances allant jusqu'à 384h, de 6h en 6h.

On retrouve les cartes de ce modèle sur le site météo allemand: Wettercentrale


Les cartes décrivent les paramètres météorologiques à certains niveaux exprimés en hPa, qui correspond à la pression à une certaine altitude.

1013hPa 0m
900hPa

990m

850hPa 1460m
800hPa 1950m
700hPa 3000m
600hPa 4200m
500hPa 5500m
400hPa 7200m
300hPa 9200m
250hPa 10400m  (niveau moyen de la tropopause)
200hPa 12000m

Carte de pression au niveau de la mer (trés grand classique): les pressions sont ramenées au  niveau de la mer pour pouvoir être comparées, même en cas de trés faible altitude (on fait ainsi abstraction du relief), et représentées par des courbes isobares. Ces cartes permettent de voir dépressions (T), anticyclones (H), dorsales, thalweg et d'estimer fronts et vents.

Cartes de géopotentiel: le géopotentiel d’une surface x hPa est l’altitude à laquelle on retrouve cette surface de x hPa. Cette altitude peut varier aussi largement que la pression au sol. On les représente avec des isohypses, courbes d'égales altitudes. Les altitudes plus élevées sont comparables aux anticyclones, les altitudes plus basses comparables aux dépressions, un thalweg est "l’excroissance d’une zone de bas géopotentiel", une dorsale est "l’excroissance d’une zone de hauts géopotentiels". Pour les vents la régle de Buys-Ballot s'applique. 

Cartes d'épaisseur entre deux surfaces isobares: Elles représentent l'épaisseur entre deux surfaces équipotentielles. Cette épaisseur est liée à la température moyenne de la couche par la relation: Ep=Z(A1)-Z(A2)=67,445*T*log(A1/A2); Cela donne une indication de la température en altitude, et constitue un moyen commode pour repérer les fronts.

Ci-dessous les pressions au niveau de la mer sont représentées par des courbes isobares blanches (bodendruck=pression au sol). Le surfaces équipotentielles sont représentées par des isohypses en noir et cotées en daM. L'épaisseur entre les surfaces géopotentielles 1000 et 500 est codé par des couleurs.

Cartes des températures en altitude: Utiles pour connaitre ce paramètre et aussi pour repérer la trace des fronts en altitudes.

Cartes des températures potentielles: cartes des températures potentielles à x hPa, c'est à dire des températures du niveau x hPa, ramenées au niveau 1000hPa par transformation adiabatique. Les fronts sont signalés par les zones où le gradient de température potentielle est très élevé

Carte de vent à x m/sol: 1 petite barbule vaut 5 noeuds, 1 grande barbule 10 noeuds, 1 triangle 50 noeuds. Le niveau 300 hPa permet de se rendre compte des courants-jets.

Carte humidité relative à x hPa: permet de se rendre compte de la répartition nuageuse à telle altitude (relative feuchte=humidité relative)

Vitesse verticale à x hPa: exprimée en hPa par heure, elle est négative pour une ascendance, positive pour une subsidience. Ce paramètre permet de se faire une idée de l'activité d'un front ou d'une dépression. Ci-dessous carte montrant la vitesse verticale grâce à un code de couleur (vertikalbewegung=mouvement vertical).

Tourbillon Potentiel de la surface isentrope 320K: le tourbillon potentiel (TP) est un paramètre conservatif sous certaines conditions qui permet de faire la distinction entre air stratosphérique et air troposphérique. Il s'exprime en PVU (Potential Vorticity Unit). L’air troposphérique a généralement un TP inférieur à 1,5PVU, alors que l’air stratosphérique a un TP souvent assez largement supérieur à 1,5PVU. La tropopause a un TP constant de 1,5PVU. La tropopause se situe vers 300hPa, et c’est en fait une surface semi-rigide, c’est à dire qu’elle ne peut pas être beaucoup poussée vers haut (à cause de la stabilité verticale à ce niveau, induite par la remontée de la température dans la stratosphère), mais peut sans trop de problèmes être « aspirée » vers le bas (l’air stratosphérique froid et sec fait alors une intrusion dans latroposphère).

Les zones où le TP varie assez rapidement et sur de courtes distances, il y a "décrochage de la tropopause", et justement, un abaissement brutal de la tropopause indique un front d’altitude qui oblige l’air qu’il y a juste devant lui à monter vers le haut, ce qui peut contribuer à la formation d'orages fort.

Ci-dessous, en supposant la surface isentrope 320K d'altitude constante, on peut apercevoir les rentrées d'air stratosphériques dans les zones rouges.

Advection de tourbillon absolu  (vorticityadvektion): ce paramètre complexe permet de déterminer les variations de rotation d’une particule d’air sur elle-même dans le temps. Les décrochages de la tropopause sont associés à des valeurs positives de l’advection du tourbillon absolu à 300hPa, ce paramètre est donc très pratique pour localiser les endroits où des orages organisés sont susceptibles d’éclater lorsque de l’instabilité est présente.

Ci-dessous Les zones en rouge sont favorables aux ascendances, donc aux orages lorsque l’air est instable:

La divergence horizontale: une ascendance forte dans la troposphère s’accompagne d’une divergence du vent sous la tropopause, et réciproquement, une divergence du vent sous la tropopause favorise des ascendances dans la troposphère. Cela permet d'estimer où se forment les structures orageuses organisées et puissantes

Ci-dessous, en orange les zones de divergence, en bleu les zones de convergence:

Lifted Index (LI): Il s'agit d'un indice d'instabilité des masses d'air

CAPE (Convective Avalaible Potential Energy, énergie potentielle convective disponible): Il s'agit d'un indice d'instabilité des masses d'air, plutôt utilisée pour déterminer la puissance d’éventuels orages

Cartes de Précipitation (stuendiger=précipitations, niederschlag=horaire): les zones pluvieuses sont matérialisées par les plages colorées bleues, l'intensité des précipitations  est en général  exprimée en mm/6h.

Coupes verticales: Elles sont désormais disponibles gratuitement pour de nombreux paramètres, avec comme constante une latitude ou une longitude donnée:
  • Température, vent et niveau de la tropopause (ligne gris en haut):
  • Vitesse verticale et divergence du vent:
  • Humidité relative, température potentielle et temps sensible (feuchte=humidité):
  • Température potentielle équivalente, masses nuageuses: La température potentielle équivalente (Théta-ae) a de particulier qu'elle permet de délimiter la position des front de manière précise. En effet, comme avec la température pseudo-adiabatique potentielle du thermomètre mouillé qui lui ressemble beaucoup, un front est trahi sur ce type de carte par un fort gradient horizontal de théta-ae. A l'inverse, les zones de faible variation horizontale de cette donnée caractérisent une masse d'air bien homogène. L'allure de la zone de gradient de théta-ae nous permet en sus de déterminer s'il s'agit d'un front chaud ou froid (e.g. un gradient est décalé vers l'est au fur et à mesure que l'altitudeaugmente indique un flux d'ouest, donc un front chaud)

  • Advection de température, advection de tourbillon, vitesse verticale: les noyaux de forte advection de tourbillon mettent en évidence les zones où l'atmosphère est très dynamique